La créativité artistique au cœur des stages Juniors de voltige
En octobre puis décembre 2021, 12 voltigeurs Juniors ont été invités par le staff fédéral pour deux rassemblements au Pôle France FFE à Saumur (49). Le fil rouge a été la création artistique des programmes libres. L’occasion d’aborder avec Romain Bernard, chorégraphe pour les équipes de France depuis plus de 20 ans, ce savoir-faire tricolore.
En octobre puis décembre 2021, 12 voltigeurs Juniors ont été invités par le staff fédéral pour deux rassemblements au Pôle France FFE à Saumur (49). Le fil rouge a été la création artistique des programmes libres. L’occasion d’aborder avec Romain Bernard, chorégraphe pour les équipes de France depuis plus de 20 ans, ce savoir-faire tricolore.
12 voltigeurs Juniors - 4 garçons et 8 filles, dont Océane Gehan, Isabella Dabat, Maëlys Marmin, Baptiste Terrier, Louis Dumont, Tom Menand, sélectionnés au championnat du monde du Mans (72) l’été passé - ont été conviés par le staff fédéral pour deux stages à Saumur (49). Seule Lena Dao Duc Long, 13 ans et licenciée au club hippique de Meaux (77), a vécu ses premiers rassemblements nationaux.
Ils ont pu disposer des conditions optimales d’entraînement de leur Pôle France FFE (cheval mécanique, salle de gym avec tous les agrès spécifiques, etc.). Le premier stage, réalisé du 25 au 29 octobre pendant les vacances de la Toussaint, a été composé uniquement de travail en salle, certains chevaux étant encore au repos après leur saison sportive. Le rassemblement a été orienté autour du programme libre, et chacun a pu ébaucher le sien.
Du 18 au 22 décembre, ces athlètes se sont retrouvés par demi-groupe de 6, afin de permettre un accompagnement individualisé. La journée du 20 a réuni l’intégralité du groupe et une mise en situation commune a été proposée. Cette fois, des exercices à cheval ont été inclus, et l’aspect technique mis en avant avec la présence d’un juge, tandis que les ambiances des programmes libres de chacun ont été achevées.
Le programme libre, un travail fondamental
Le programme libre, un travail fondamental
Ce travail artistique est essentiel. Dès cette saison, le programme libre prend encore plus d’importance et compte désormais pour 3⁄4 de la note finale lors d’un championnat international. Le nouveau règlement de ces compétitions de référence permet aux 20 meilleurs voltigeurs, à l’issue de l’épreuve imposée puis libre, de prendre part à une unique épreuve libre support de la finale - contre 15 athlètes sélectionnés précédemment pour deux nouveaux exercices (imposé et libre). Une nouveauté qui a pour objectif de rendre la compétition plus courte et dynamique. Il y a un fort enjeu de maintenir ce qui fait la spécificité de la France depuis de longues années, c’est-à-dire son savoir-faire artistique, qui est une véritable marque de fabrique des voltigeurs tricolores.
“Je suis très satisfait du travail accompli”, expose François Athimon, sélectionneur national Juniors. “Les athlètes ont réinvesti le travail effectué depuis deux ans et le premier confinement, où l’accent avait été mis sur l’aspect artistique. Ils ont dévoilé de fortes capacités mentales et de concentration, avec un premier stage exigeant. Lors du deuxième, ils ont exprimé beaucoup d’envie en faisant de réelles propositions artistiques. Ils sont acteurs de leur projet d’une manière impressionnante pour leur âge. Pour se révéler totalement artistiquement lors de la réalisation concrète, ils manquent encore un peu de maîtrise technique, véritable passage obligé sur lequel nous travaillons.”
Romain Bernard, chorégraphe des équipes de France depuis 1999, danseur et professeur d’EPS
Romain Bernard, chorégraphe des équipes de France depuis 1999, danseur et professeur d’EPS
Comment avez-vous travaillé avec les voltigeurs lors des deux derniers stages ?
Nous avons travaillé à la conception des programmes libres. Au premier stage, nous avons mis l’accent sur l’aspect chorégraphique, afin que les athlètes acquièrent une gestuelle qu’ils pourront ensuite réinvestir. Pour cela, je leur ai proposé des ateliers de recherche, des sessions de danse avec des mouvements imposés et une part d’improvisation.Nous avons aussi organisé des rendez-vous personnalisés avec François Athimon et Bamdad Memarian, chargé de préparation physique et technique au Pôle France FFE. Lors du deuxième stage, deux rendez-vous individuels d’une heure ont été proposés aux voltigeurs, afin de les aiguiller pour étayer et compléter leur propos chorégraphique. Mon objectif est que chacun d’entre eux puisse acquérir un vocabulaire gestuel singulier.
Quel est votre regard sur ce que le groupe propose artistiquement ?
Depuis le premier confinement, nous avons mis en place un réel travail de suivi chorégraphique, avec des fiches de correction. Leur progression globale est très satisfaisante, ils se sont accaparés ce côté artistique et savent que c’est incontournable. Les corps se délient vraiment et les recherches qu’ils proposent sont intéressantes pour un chorégraphe.
Vous accompagnez également les Seniors. Est-ce différent d’assister un collectif Juniors ?
Il n’y a pas de différence dans l’axe de création que je leur propose. Même si les Juniors ont un vécu moins important, ils apportent néanmoins des gestuelles riches. Il arrive qu’ils soient mélangés aux Seniors lors des stages, avec des ateliers communs. Même s’il y a une différence de génération, on voit que les Juniors ont progressé. Ma façon de faire n’a pas changé avec le temps et ce fil conducteur est intéressant ; je connais et suis certains voltigeurs depuis plusieurs années. La cohérence est importante. J’ai la conviction que ce que je fais est juste, et je ne déroge pas de ce que j’estime être le meilleur pour amener chacun au plus haut - sans que cela n’empêche une remise en question. Cette nouvelle génération est en train de prendre la relève et de perpétuer l’orientation donnée à la voltige, en étant pleinement intégrée à un système mis en place depuis plusieurs années maintenant par le staff fédéral.
Quels sont les paramètres à prendre en compte pour proposer un programme libre efficace auprès des juges ?
Il faut comprendre le code de pointage et les attentes. Je les ai formalisés à travers une grille d’évaluation artistique, en adéquation avec les règlements nationaux et internationaux, ce qui permet de donner une ligne de conduite. Pour cela, l’échange avec les juges a été essentiel. Ensuite, il faut rester droit dans ses bottes sur ce qu’on estime être juste. À vouloir toujours faire plaisir, on peut finir par se restreindre, ce qui ne permet pas de progresser. Il faut se sentir libre de travailler comme on le souhaite. En France, nous sommes en avance sur les autres nations d’un point de vue artistique, en prenant le parti d’être copiés plutôt que de copier les autres.
Cet aspect artistique est justement l’une des marques de fabrique de la France…
Un système composé de personnes compétentes dans leur domaine, avec des rôles précis, a été mis en place, incluant par exemple Sébastien Langlois au sujet du travail des chevaux ou Bamdad Memarian pour la préparation physique. Le travail avec un chorégraphe a permis à la France de sortir du lot, tandis que le travail commun entre les Seniors et les Juniors permet un maillage générationnel. Depuis 20 ans, ma vision de la chorégraphie a été modifiée. Avec les Juniors, il y a deux façons de procéder aujourd’hui : soit on choisit un propos chorégraphique issu d’une thématique précise (un film, une musique, etc.), parfois plus simple car imagé, soit on choisit d’avoir en objet la danse elle-même. Cette proposition est possible grâce à l’évolution de la discipline, en fonction des singularités de chacun. L’objectif est de faire passer des émotions au public et aux juges, qui doivent réfléchir par eux-mêmes où cela les mène personnellement.
En route vers les championnats d’Europe
En route vers les championnats d’Europe
Les voltigeurs Juniors se retrouveront en février prochain pour un nouveau rassemblement. La reprise des compétitions nationales se fera fin mars/début avril tandis que la rentrée internationale est programmée à Ermelo du 29 avril au 1er mai. Le plan de la saison sera prochainement affiné pour chaque athlète, en concertation avec le staff fédéral et les entraîneurs. Avec un seul objectif : être performant au championnat d’Europe à Kaposvár (HUN) du 27 au 31 juillet prochain.